Synthèse académique des EGNT

Au terme des sessions d’ateliers spécifiques au premier et au second degré, se tenait ce mardi 13 octobre la synthèse académique des États Généraux du Numérique Territorialisés.

En introduction, Madame Valérie Cabuil, Recteur de l’Académie, a repris les grandes lignes des notions échangées lors des ateliers, notamment les besoins en formation et en accompagnement, et la définition d’un périmètre précis d’usages responsables du numérique.

La matinée a été animée par Monsieur Julian Alvarez, chercheur en communication et en sciences de l’information à l’INSPE Lille Nord de France, spécialisé dans la ludo-pédagogie et la gamification, et Monsieur Jérôme Fabbri du cabinet Ernst & Young, représentant également la Banque des Territoires.

Monsieur Mohammed Bennani, Directeur des Systèmes d’Information, et Monsieur David Detève, Délégué Académique au Numérique de l’Académie de Lille ont débuté la séance de travail par une définition du numérique, qui précise que le concept englobe l’informatique, la téléphonie et plus largement la communication et l’Internet. Le numérique est un moyen d’agir sur la gestion de la vie quotidienne, de la scolarité de l’élève et de la carrière des professionnels. Monsieur Detève a ajouté que le numérique éducatif repose sur 4 piliers : c’est un levier pour mieux apprendre, un ensemble de compétences spécifiques, une culture et un déclencheur permettant d’améliorer le fonctionnement global des organisations (comme nous l’avons vécu à l’occasion du confinement). Monsieur Bennani s’est référé à des travaux universitaires pour conclure  en disant que le numérique est un amplificateur pédagogique.

Se plaçant du point de vue de la recherche, Monsieur Julian Alvarez a expliqué qu’il a classé les échanges générés lors des ateliers en catégories afin de définir des pistes d’analyse. Le détail du travail de M. Alvarez se trouve dans le support de synthèse en fin d’article.

Vint ensuite le temps des tables rondes dont la première portait sur les équipements et la sécurité numériques.


Madame Joëlle Cottenye, vice-présidente du conseil départemental du Nord, a exposé que la situation sanitaire a permis de mettre en place un certain nombre de procédures et que pour utiliser le numérique il faut que les territoires soient connectés. Le confinement a accéléré la mise en œuvre d’un processus déjà anticipé avec des travaux qui avaient débuté avant même d’envisager la crise sanitaire. Le département du Nord a souhaité créer le lien entre les différents acteurs, co-construire et mutualiser au-delà des murs de l’établissement, puisque le numérique est un projet de société et qu’il faut partir des besoins des territoires.
Monsieur François-Xavier Salmon, directeur adjoint des établissements d’enseignement pour la région Hauts-de-France a confirmé l’aspect « accélérateur » des projets de déploiement. La mise à disposition d’équipements sur un temps très court autour du reconditionnement de machines informatiques, s’est accompagnée d’un développement des usages de l’Environnement Numérique de Travail, avec une action de la région en ce sens (mise en place de l’application Webconference, de l’application mobile…).
Madame Blandine Drain, vice-présidente en charge des collèges, des politiques éducatives et de l’enseignement supérieur pour le département du Pas de Calais, a abondé dans le sens de l’anticipation. Les collèges du Pas-de-Calais disposaient déjà d’un matériel numérique important (VPI, balado-diffusion, tablettes). Mais le confinement a fait émerger d’autres besoins, et permet d’envisager une réorientation des politiques mises en place. Par ailleurs, le département du Pas de Calais a également financé l’ENT pour toutes les écoles de son territoire. Madame Drain a expliqué que le prêt du matériel aux familles par les collèges au moment du confinement, a été freiné par la complexité du nomadisme. Dès lors, le département travaille désormais à une modalité d’équipement des familles.
Monsieur Luc Waymel de l’association des maires ruraux du Nord a insisté sur le fait que l’enjeu n’est pas tant l’équipement que les possibilités en connexion, dans les territoires les plus reculés de l’académie. Il a présenté les actions sociales menées en faveur des usages du numériques : partenariat avec Orange pour les abonnements, reconditionnement de matériels, modalités d’accès gratuites au Wifi…

Monsieur Sébastien Vautherot, secrétaire général adjoint d’Académie, a tout d’abord rappelé les actions menées par la CAF pendant le confinement, et il a insisté sur la proposition académique qui consiste à réunir l’ensemble des acteurs pour redéfinir les actions mises en place, et à réfléchir à l’avenir sur des actions en synergie. C’est donc l’expertise commune qui pourra faire avancer le dossier du numérique dans le cadre d’une gouvernance globale.
Madame Anne-Laure Arino, DAASEN dans le département du Nord a donné l’exemple du déploiement, sous l’impulsion de la préfecture, de tablettes sur les territoires du Valenciennois et de Sambre-Avesnois. Dès le début du confinement et dans l’urgence, tous les acteurs déjà présents (cités éducatives…) ont été interrogés afin dévaluer les matériels pouvant être mis à disposition. Ainsi chacun a été engagé dans cette démarche collective, qui a initié une nouvelle forme de gouvernance. Il a été remarqué que les échanges n’ont peut-être jamais été aussi nombreux que lors de cette période contrainte à la distance, ce qui remet en question les modalités de communication et lève certaines craintes sur le numérique.

Concernant enfin la sécurité des usagers, Monsieur Thomas Delemer, responsable de la sécurité des systèmes d’information (RSSI) de l’académie, précise que c’est un enjeu véritable de garantir la sécurité des élèves et des enseignants. Des conventions entre les instances académiques et les collectivités semblent une piste à privilégier, pour garantir un niveau de conformité et de sécurité entre tous, et en toute transparence. Dans ces sujets, il convient de se montrer extrêmement réactif, ce que la crise a également appris.

La deuxième table ronde était axée sur les usages du numérique éducatif. Madame Amélie Silvert, formatrice académique et chargée de mission au sein de la DANE, a introduit la table ronde en expliquant que le contexte a redéfini les lignes, et que parfois le sachant est devenu l’apprenant. Divers freins ont été repérés:  l’obstacle de la technique, la peur de se lancer… Le ratio maîtrise-résultat a découragé certains enseignants ainsi que l’aspect « intrusion dans la vie privée ». La différence peut se faire quand l’enseignant est convaincu de l’efficacité de sa pratique à distance, et de l’efficacité de l’outil lui-même, dans un cadre sécurisé et sécurisant. Sur ces points, l’identification des outils validés et la formation sont prépondérantes.
Sur l’offre de services, Monsieur David Markowski de l’INSPE LilleNord de France et Monsieur Jean-Luc Rosar, directeur territorial adjoint de CANOPE, ont souligné le risque de voir des prestataires privés et les GAFAM solliciter les enseignants à des fins commerciales. En ce sens les initiatives locales sont à favoriser et à promouvoir.

Monsieur Albin Cattiaux, doyen des IPR, a mis en avant le fait qu’on ne parte pas de rien. Il a souligné le fait que, pendant le confinement,  certains professeurs ont été parfois davantage focalisés sur les outils que sur les usages mais il a aussi salué l’inventivité dont ont fait preuve globalement les enseignants. Certains se sont même nourris de l’acculturation au numérique de leurs élèves. Les inspecteurs ont mis l’accent sur les actions d’accompagnement, visant à lever les inquiétudes et les réticences et à maintenir le lien. Monsieur Cattiaux a notamment  évoqué la mise en place des espaces de continuité pédagogique sur les sites disciplinaires, la création de la Banque Académique de Ressources sur les ENT ou encore l’enregistrement de capsules vidéo dans le cadre du projet « Hauts-de-France Apprenants » avec la chaîne Weo.
Madame Pascale Bourbon, DPO de l’Académie, a souligné le fait que l’urgence ne devait pas masquer la nécessité d’une réflexion autour des outils et de leur conformité. Il faut apprendre à adopter les bons réflexes, en établissant, par exemple, des chartes co-construites et des codes de conduite.

Madame Marie-Françoise Godon, doyenne des inspecteurs du premier degré, a montré l’importance d’un volet « parentalité » dans la pédagogie en distanciel, en particulier dans le premier degré. En effet, lors du confinement, une partie de la continuité pédagogique est passée par les échanges téléphoniques (notamment en maternelle), et ces pratiques doivent être encadrées pour définir les bons usages. Par ailleurs, les partenaires de l’école ont une expertise sur laquelle il convient de s’appuyer. Les dispositifs existants comme les associations de parents d’élèves, doivent être mobilisés, afin de porter le « bon message » et de se faire le relais des pratiques attendues au service des enfants/élèves.
Madame Bénédicte Swiderski, doyenne des IEN ET/EG/IO a conclu la table ronde en précisant que le distanciel a favorisé le développement de l’autonomie chez les élèves de lycée professionnel, mais a permis aussi de replacer la famille au cœur de la communication. Cette « entrée dans la sphère privée » a permis d’analyser les contextes, et d’identifier des pistes d’amélioration à l’avenir (mise à disposition du matériel, formation des parents, appui sur les partenaires locaux…).

La dernière table ronde portait sur le sujet de l’inclusion et du numérique.
Les échanges ont été lancés par Monsieur Thomas Stelmaszyk, principal du collège du Val-de-Gy d’Avesnes le Comte, qui a indiqué que le numérique a toujours été en trame de fond dans les questions d’inclusion et qui a constaté qu’il n’y a plus de limite technique à l’utilisation du numérique dans le cadre de la scolarisation des élèves à besoins éducatifs particuliers. Ceux-ci ont pour la plupart construit leur propre parcours scolaire avec les outils numériques. Sur ces sujets et en collaboration avec la MDPH, l’équipement et les ressources doivent être au centre des intérêts.
Monsieur Thierry Paluch, directeur de l’IEM Amedée Fougerousse et du SESSAD de Douai, a argué que la difficulté est liée à la pluralité des besoins, car le handicap ne s’arrête pas à la distinction handicap moteur et handicap mental. Il a expliqué le projet de mise à disposition de ressources numériques s’appuyant sur l’accessibilité (mais disponible pour tous les élèves de niveau maternel), mené et co-construit par des enseignants. Le numérique peut selon lui pleinement servir de levier pédagogique au service de l’inclusion.

Monsieur David Rataj, conseiller technique école inclusive pour l’Académie de Lille, a expliqué que l’on parle d’élèves fragiles, qui ont besoin d’un accompagnement individualisé et soutenu. Dès lors, le numérique apporte une aide, mais pas à n’importe quel prix. Cette démarche doit au contraire être accompagnée, pour mettre l’accent sur les bonnes pratiques dans la mise à disposition de ressources institutionnelles à distance. La pédagogie inversée, la pédagogie de contrat à destination des familles, sont en ce sens des modalités à promouvoir.
Madame Touraya Abdellatif, DAASEN du Pas de Calais, a insisté sur l’enjeu de débloquer la vision partagée entre les différents partenaires, en s’appuyant tout d’abord sur les acteurs locaux, les plus à-même d’identifier les modalités les plus pertinentes en matière d’accessibilité. Le but n’est pas de compenser, mais de s’adapter (pour l’élève comme pour l’équipe pédagogique). Cela passe par l’aide humaine, l’accessibilité pédagogique et le matériel adapté, et cette démarche doit être analysée en synergie.

Pour les élèves atteints de longue maladie, Monsieur Sébastien Vermandel, responsable de l’APF-Lab Le Hub, s’appuie sur des initiatives mises en place dans d’autres académies. Il a expliqué que la situation de confinement a pratiquement permis aux élèves au parcours classique de connaître ce que vivent chaque jour ces élèves éloignés du système éducatif pour des raisons médicales, tant sur l’aspect pédagogique que social. Il y a une nécessité de mettre en place des ressources accessibles à tous les moments.

Après un temps de questions-réponses, la conclusion de la demi-journée a été réalisée par Madame le Recteur qui a indiqué que le numérique doit aussi permettre le développement de l’esprit critique. La ressource est évidemment importante, mais la démarche l’est tout autant, tant pour l’enseignant que pour l’apprenant, là où les rôles sont parfois redistribués. C’est une éducation à un autre versant de la citoyenneté, qui dépasse le cadre de la scolarité. Une preuve s’il en est besoin de la place du numérique dans la vie de tous les jours.  Elle a souhaité que ces états généraux du numérique territorialisés se poursuivent par la mise en place de groupes de travail afin de poursuivre la réflexion partagée et nous a donné rendez-vous l’année prochaine pour une nouvelle journée d’échanges rassemblant l’ensemble des acteurs du numérique à l’échelle académique.

Le support de présentation de la synthèse des EGNT : EGNT_reunion de synthèse